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Comment stopper les ruminations mentales : conseils et traitements

17 Juin 2024
Élaboré par
Clement Chaal
Vérifié par
Rédigé par
Inès Mouldi
Comment stopper les ruminations mentales : conseils et traitements

Le terme « rumination mentale » trouve son origine dans le comportement des bovins. De manière analogue à la mastication incessante des vaches, une personne sujette à ce phénomène fait tourner en boucle dans son esprit des pensées sombres qui entraînent une fatigue psychique et mettent fin à ses moments de sérénité. Il est important de noter que ce mode de fonctionnement peut constituer un facteur prédictif de divers troubles psychiatriques. Fort heureusement, plusieurs solutions existent pour limiter ou surmonter cet excès de réflexion.

Qu’est-ce que les ruminations mentales ?

Nombreux sont les théoriciens, les psychologues et autres psychiatres  qui se sont intéressés à cette notion et qui  ont conceptualisé ou défini les ruminations mentales. 

Dans « Vaincre la Dépression », Adis et Martell (2017), les décrivent comme le fait de ressasser des situations passées et des pensées douloureuses ainsi que les inquiétudes qui y sont connectées.

Il faut savoir que, selon la théorie du style de réponse de Nolen-Hoeksema (1991), deux réponses cognitives peuvent être envisagées face à la détresse émotionnelle. La distraction va permettre d’éviter de réfléchir aux évènements anxiogènes. En ce qui concerne la rumination, il s’agit  de la répétition d’un schéma de pensée qui se focalise sur l’analyse des origines, des significations et des conséquences des états affectifs.

Bien que la distraction puisse être saine et efficace si elle n’utilise pas de médicaments, de l’alcool ou de drogues, les pensées intrusives, récurrentes et permanentes constituent rarement une stratégie adaptée.

La vidéo qui suit facilite l’identification des ruminations:

Les causes des ruminations mentales

Parmi les facteurs prédisposant aux ruminations mentales, Vincenti (2019) identifie l’autoréflexion. Ce processus est défini comme la focalisation sur ses propres pensées, émotions et expériences. Bien qu’il soit normal et fréquent dans la population générale, des études en psychiatrie ont établi l’existence d’une forme inappropriée et négative de celui-ci chez les individus souffrant de troubles psychiques.

Sur le plan physiologique, Siegle (2003) a démontré que les personnes qui ruminent ont un fonctionnement qui leur est propre. Ainsi, après un événement mentalement éprouvant, elles vont présenter une suractivation orthosympathique, une activité moindre du cortex préfrontal et une baisse graduelle de la tension artérielle.

D’autres chercheurs ont été intrigués par l’inégalité des hommes et des femmes face à ce phénomène. Ils ont alors mené des expérimentations sur des femmes ayant des taux hormonaux différents d’œstradiol et de progestérone et ils en ont déduit que les hormones sexuelles avaient un impact sur le choix de la stratégie de régulation émotionnelle à adopter.

Les conséquences des ruminations mentales sur la santé mentale et physique

Le célèbre psychiatre français Christophe André (2009) a comparé la rumination à l’inflammation. Selon lui, il s’agit d’ « un mécanisme naturel de défense et de cicatrisation de notre corps qui a dépassé son objectif et devient lui-même une pathologie : ce qui devait n’être qu’une réflexion destinée à régler un problème devient une interminable chaîne d’états d’âme douloureux et inutiles ». Cela a irrémédiablement des conséquences sur l’organisme et sur l’équilibre psychique du sujet.

Impact des ruminations sur la santé mentale

Les ruminations mentales s’imposent au sujet et embuent son esprit. La concertation et la mémorisation se trouvent alors clairement altérées. Par ailleurs, lorsqu’elles sont efficaces, ces fonctions cognitives viseront plus une focalisation sur les informations négatives qu’à la centration sur les éléments positifs.

Il faut aussi savoir que ce fonctionnement psychique va favoriser l’apparition des troubles dépressifs et anxieux. Cela a été prouvé par la recherche de NolenHoeksema et Morrow, citée par Van Rillaer (2016). En effet, ces chercheurs ont d’abord évalué le type de gestion émotionnelle des participants. Le hasard a fait que quelques jours plus tard un grand tremblement de terre a eu lieu. En revoyant les groupes étudiés, ils ont découvert que ceux qui ressassent constamment étaient plus déprimés ou angoissés que le reste des sujets de l’étude.

Enfin, l’autre conséquence indirecte, c’est le fait que le cercle amical des personnes sujettes aux ruminations se lasse et s’éloigne d’elles. Cela réduit le soutien social et renforce le stress et l’isolement.

Impact des ruminations sur la santé physique

La rumination mentale abrase la capacité du sujet à lâcher prise. Cela aura un retentissement très important sur son aptitude à s’endormir facilement et sur la qualité de son sommeil de façon générale. Parmi les répercussions immédiates de ce phénomène, nous observerons des réveils difficiles, un accroissement de l’irritabilité et des tensions musculaires, une grande fatigue ainsi qu’un affaiblissement des défenses immunitaires.

Par ailleurs la personne qui n’arrête pas de ressasser les idées et évènements négatifs verra son appétit modifié. Soit elle va s’acharner sur l’alimentation pour s’apaiser, soit elle ne va plus avoir envie de manger.

Il faut aussi savoir que certaines personnes se réfugient dans l’alcool et dans les substances psychoactives pour se distraire de ces pensées. En cas d’addiction, elles pourront développer des troubles cardio-vasculaires, nerveux, hépatiques, rénaux…

Comment prévenir et gérer les ruminations mentales ?

Pour gérer le stress et les ruminations, il est possible de passer par l’instauration d’un lien bienveillant avec soi-même. Il est également recommandé d’apprendre à contrôler ses fonctions corporelles et ses tensions physiques pour faire régner l’harmonie dans son esprit.

Pratiquer l’autocompassion

Il s’agit d’une approche indulgente envers soi et envers ses propres comportements, affects et pensées. 

Le sujet peut la pratiquer en d’accordant la même bienveillance dont il fait preuve avec autrui. Il doit s’écouter, accepter ses ressentis et ne pas s’infliger des doubles peines en se culpabilisant ou en se sous-estimant face aux situations. Enfin, il doit reconnaître sa part d’humanité et normaliser ses échecs en les intégrant comme une étape normale, et parfois nécessaire, dans chaque process ou projet de vie.

Comment prévenir et gérer les ruminations mentales ?

Apprendre à se relaxer

Parmi les techniques de gestion du stress qui peuvent être les plus redoutables face aux ruminations, il y a la relaxation. Celle-ci se déploie elle-même à travers divers moyens allant de la respiration à la détente musculaire :

  • La cohérence cardiaque : il s’agit d’une méthode de contrôle de la respiration qui réduit le nombre des inspirations à 6 par minute, et ce, durant 3 à 5 minutes. Ce rythme va avoir un impact sur le système nerveux autonome, calmant généralement le cerveau pendant 4 heures.
  • La relaxation progressive de Jacobson : cette approche consiste à décontracter l’ensemble de la musculature dans le but de susciter un relâchement au niveau psychique. Cela passe par des contractions-décontractions de tous les groupes musculaires, un par un.

Conseils pour stopper les ruminations mentales 

Comme nous l’avons suggéré au début de cet article, la distraction est une stratégie qui permet de se sortir de la détresse émotionnelle. Il en est de même pour la pratique du mindfulness, cette approche méditative trouvant ses origines dans le bouddhisme.

Pratiquer des hobbies et activités relaxantes

Le cerveau humain n’est pas programmé pour réaliser diverses tâches simultanément. Il faut donc se servir de cette propriété pour noyer les ruminations. Ainsi, afin de les faire taire, il est conseillé de créer une interférence cognitive. 

Sortir, se plonger dans la lecture d’un livre, appeler un proche, jouer aux mots croisés sont tant d’activités qui vont mettre fin aux pensées stressantes et envahissantes. Il est également possible de faire un sport apaisant comme le yoga ou du Pilate pour profiter de la sécrétion d’endorphines qui va calmer l’esprit.

La méditation Pleine conscience

L’efficacité scientifique de la méditation pleine conscience dans le traitement de divers symptômes et trouble psychique a été démontré via diverses recherches scientifiques.

Celle de Pan et ses collaborateurs (2022), a d’ailleurs révélé que cette pratique améliore l’humeur et la gestion émotionnelles des patients. Elle a également attesté de l’efficience du Mindfulness face aux ruminations de sujets dépressif et/ou anxieux. En se focalisant sur le présent, la personne se détourne de ses pensées centrées sur le passé et le futur et elle arrive ainsi à  les rationaliser.

Traitements professionnels pour les ruminations mentales

Si les techniques préalablement citées ne suffisent pas que les ruminations empiètent sur le quotidien et la qualité de vie du sujet de manière claire, il est conseillé de s’adresser à un psychothérapeute.

La Thérapie cognitive-comportementale (TCC)

Nous encourageons fortement la sélection d’un professionnel en thérapie cognitivo-comportementale reconnu. Ce type de thérapeute assiste le patient dans l’identification et la modification de ses schémas de pensée leur permettant de passer de la polarité négative vers la positive. En agissant sur la cognition du sujet, il modifie radicalement sa manière d’évaluer les situations et de réagir aux événements.

La Thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT)

Il faut d’abord noter que l’ACT est une variante de la TCC. Les praticiens de cette méthode thérapeutique n’entreprennent pas de modifier les pensées du sujet, mais plutôt de l’orienter vers leur acceptation. Simultanément, ils facilitent l’identification des valeurs personnelles du patient et encouragent l’engagement dans des actions en harmonie avec celles-ci. Cette démarche favorise la sortie du mode de rumination mentale.

Témoignage d’une personne ayant réussi à stopper ses ruminations mentales

M. nous a parlé de  son parcours avec les ruminations mentales et des méthodes qui l’ont aidée à s’adapter à ce phénomène.

«  Je suis du genre à analyser, à anticiper et à réfléchir constamment, surtout en cette période compliquée. Je ressasse les évènements passés en me disant « j’aurais dû faire ceci ou lieu de cela », je me remémore mes émotions et j’analyse le pourquoi de leur émergence, je décortique les réactions de mon entourage… Ces pensées incessantes, accentuées par le Covid-19, m’ont poussée à rechercher désespérément le bouton off.

Ma quête vers le lâcher-prise a commencé au moment où j’ai réalisé qu’il était inutile de lutter contre les émotions négatives. Des méthodes telles que la visualisation, l’écriture pour vider mon tourbillon mental et la focalisation sur les aspects positifs de la vie, sont devenues mes alliées. J’ai compris qu’abandonner la recherche de la perfection et adopter la bienveillance envers moi-même étaient des attitudes essentielles pour retrouver l’apaisement. »

Autres moyens et ressources pour gérer et stopper les ruminations mentales

En plus des méthodes précédemment recommandées, il existe d’autres outils disponibles en ligne ou en librairies qui permettent de rompre avec les ruminations d’une manière efficace.

Livres sur la gestion des ruminations mentales

Une très grande collection d’ouvrages a été consacrée aux pensées négatives récurrentes et persistantes et aux techniques dédiées à les gérer. Parmi les titres que nous pouvons recommander, il y a :

  • Sortir des ruminations mentales, de la psychiatre Marine Colombel.
  • Je rumine, tu rumines… nous ruminons, du médecin et neuropsychologue Bernard Anselem.
  • L’activation comportementale : traitement des évitements comportementaux et de la rumination mentale, écrit par les professeures Sylvie Blairy, Céline Baeyens et Aurélie Wagener.

Applications mobiles de méditation et de relaxation

Bien que les smartphones soient souvent associés à divers problèmes, actuellement observés par les professionnels de la santé mentale, ils offrent néanmoins des applications mobiles qui aident à renouer avec le bien-être et la sérénité. Parmi celles-ci, nous conseillons :

  • La Mhealth App, conçue par des psychologues et des psychiatres afin d’aider les personnes à améliorer leur régulation émotionnelle
  • Petit Bambou, qui permet d’accéder aux grands principes de la méditation et de profiter de 8 séances gratuites.
  • Pleine conscience, élaborée par  Jon Kabat-Zinn, un médecin américain pionnier de la pratique du Mindfulness.

Conclusion

Facteur prédictif majeur de la dépression et de sa sévérité, les ruminations mentales se caractérisent par des pensées persistantes et négatives qui envahissent le sujet, altérant sa concentration et ses interactions sociales. Elles engendrent des perturbations du sommeil et des habitudes alimentaires ainsi que des comportements addictifs. La prévention et la maîtrise des ruminations nécessitent l’adoption de stratégies comme la gestion du stress, l’autocompassion, la relaxation, la distraction et, parfois, le recours à des psychothérapies d’inspiration cognitivo-comportementales.  Les livres spécialisés et des applications mobiles axées sur la méditation, peuvent également contribuer à apaiser l’activité mentale excessive de la personne.

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