Un deuxième trait sur le test et voilà qu’un bonheur immense envahit les futurs parents ! Une toute nouvelle vie se dessine et cette perspective est à la fois excitante et perturbante. Des angoisses totalement normales peuvent alors naître. Mais si ces dernières se transforment en un véritable état de stress persistant, cela devient réellement préoccupant. En effet, les recherches actuelles ont élargi notre compréhension des phénomènes prénataux en démontrant que les états émotionnels maternels exercent une influence sur le déroulement de la grossesse et sur le développement physique, cognitif et social du futur enfant.
Les risques du stress pendant la grossesse
Les sources de stress pendant la grossesse sont variées. Les femmes s’interrogent sur leur aptitude à assumer leur rôle de mère, redoutent l’accouchement et ses éventuelles complications et sont préoccupées par les nombreux examens médicaux et démarches administratives à accomplir. Parallèlement, durant la période péri-natale, l’inconscient bouillonne et il peut raviver des souvenirs anciens et des traumatismes oubliés. L’accumulation de tous ces facteurs peut avoir un impact significatif sur l’état psychique de la femme enceinte, déclenchant dans certains cas un état de stress intense et persistant.
Conséquences du stress sur la santé maternelle
Sur le plan physiologique, ce sont les modifications hormonales nécessaires au développement de l’embryon qui peuvent expliquer, en partie, les variations de l’humeur de la femme enceinte, son irritabilité et son stress. Ses angoisses vont aussi stimuler la sécrétion de cortisol et tout cela engendrera de nombreuses manifestations physiques difficiles à supporter quand elles viennent s’associer aux signes sympathiques de la grossesse, tels que les nausées.
La femme pourra alors se plaindre de :
- Douleurs abdominales,
- Eruptions cutanées,
- Tensions et algies musculaires,
- Fatigue et troubles du sommeil,
- Troubles de l’attention et de la concentration.
L’état nerveux peut aussi entraîner des problèmes, à surveiller de près chez la future maman, comme l’hypertension et le diabète gestationnel.
Impact du stress sur le développement de l’embryon et du fœtus
Diverses études longitudinales ont été menées auprès de différents groupes de femmes enceintes, et ce durant des années, afin d’étudier le lien entre les états affectifs prénataux et le développement du fœtus et de l’enfant. Les résultats ont révélé des informations précieuses que les chercheurs continuent encore à approfondir. Parmi ces dernières, il a été confirmé par Lazinski et ses collaborateurs (2008) que le cortisol de la maman est capable de traverser la barrière placentaire et c’est ce qui permet son action sur le processus évolutif de l’embryon et de l’enfant. Quant à O’Connor et ses collègues (2002), ils attestent que le stress sévère va avoir un impact sur le développement physique du fœtus lorsqu’il est vécu en début de grossesse. Par contre vers la fin, il va altérer le développement neuro-comportemental.
Les nombreuses revues de la littérature permettent de dégager ces conséquences du stress :
- Le retard de croissance intra-utérin,
- L’insuffisance pondérale à la naissance,
- L’asthme,
- Une augmentation du risque de maladies cardio-métaboliques à l’âge adulte,
- Des retards du développement cognitif à l’enfance qui peuvent toucher le langage, la concentration…
- Un déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH),
- L’anxiété dès le jeune âge,
- Les troubles des conduites et l’impulsivité à l’adolescence,
- La dépression…
Risques de complications pendant la grossesse liées au stress
Malheureusement, le stress va fréquemment entraver les joies de la grossesse. En réduisant l’immunité de la future maman, il va la rendre plus exposée aux infections ce qui peut compromettre le déroulement normal de la gestation.
Par ailleurs, il a été reporté que les tensions psychiques augmentent de 17 % la menace d’un accouchement prématuré. D’après Debiève (2011), cela s’explique principalement par l’élévation importante de la CRH chez la femme, or ce neuropeptide est directement impliqué dans l’apparition des contractions.
En 2017, Qu et ses collaborateurs ont réalisé une méta-analyse de toutes les études portant sur le lien entre le stress et les fausses couches. Ils ont alors découvert que les facteurs psychologiques peuvent élever le risque d’interruption de grossesse d’environ 42 %. Selon eux, cela peut être dû à l’activation de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien augmentant la production du cortisol ou à l’inhibition de l’axe hypothalamo-hypophyso-gonadique qui engendre une baisse grave des taux de progestérone.
Solutions pour gérer le stress pendant la grossesse
Il a été prouvé que la gestion du stress durant la grossesse avait plusieurs bienfaits. En effet, cela réduit la sensation de fatigue et diminue la fréquence et l’intensité des signes sympathiques. Le sommeil se trouve amélioré, et même l’accouchement se déroule dans des circonstances optimisées. Ainsi, Drugmanne (2019) confirme que le nombre de césariennes et d’instrumentation baisse considérablement chez les mamans qui ont veillé à réduire leurs angoisses lors de la période de gestation.
Techniques de relaxation et de méditation adaptées aux femmes enceintes
Nombreuses techniques s’offrent à la future maman pour se relaxer, renouer avec le bien-être et apprécier ainsi les neuf mois de sa grossesse. Parmi celles qui sont vivement recommandées dans sa situation, il y a :
L’autohypnose : alternant un état de relâchement profond et des auto-suggestions positives, cette pratique réduit l’impact des variations hormonales et permet d’apporter un mieux-être somatique et mental. Il faut, par contre, noter qu’elle est déconseillée aux personnes présentant des troubles psychiatriques sévères, tels que la schizophrénie.
L’haptonomie : il s’agit d’une technique conçue par Frans Veldman et qui se base sur le toucher affectif. Elle permet de créer un système de communication entre la mère, le père et le bébé afin de préparer la rencontre en apaisant chaque membre de cette triade.
La sophrologie obstétricale : cette méthode de gestion émotionnelle accompagne la future mère dans son processus psychique et physique de la grossesse. Elle l’aide à appréhender sereinement son nouveau rôle et à se préparer à l’accouchement. Les études ont prouvé qu’il y avait plus de délivrance par voie basse et beaucoup moins de stress chez les femmes ayant suivi des séances avec un sophrologue.
La visualisation : parmi la technique d’imagerie mentale, celle-ci est très efficace pour réduire les angoisses des mamans quant à l’accouchement. En visualisant ce dernier d’une manière apaisée, cela s’ancre dans la mémoire cellulaire et favorise la mise en place de mécanismes d’adaptation optimisés pour le jour J et la période qui le précède.
L’importance d’une alimentation équilibrée et d’une activité physique douce
Afin de favoriser le bien-être, il est conseillé aux femmes enceintes de manger équilibré et de privilégier les aliments anti-stress. Ces derniers sont généralement riches en magnésium, en oméga-3, en tryptophanes et en vitamines A, B et C. Il faut aussi limiter le sucre raffiné.
Parallèlement à cela, il est hautement recommandé de faire un sport doux pour réduire le niveau des angoisses et se maintenir en forme. Parmi les disciplines les plus adaptées, il y a le yoga prénatal. Cette pratique utilise la respiration consciente et permet la réduction du rythme cardiaque, de la tension et des douleurs cervicales et musculaires. Une meilleure oxygénation du sang en résulte également et cela facilite la détente et le relâchement.
Le soutien social et l’accompagnement psychologique pendant la grossesse
Le soutien social est primordial au moment de la grossesse. Il permet à la future maman de se sentir en sécurité et d’échanger sur ses ressentis. Elle peut bénéficier du support de son conjoint, de sa mère, de ses autres proches ou de ses amis durant cette phase de la vie. Les études ont montré que cela aide à renforcer les capacités adaptatives de la femme enceinte à sa future situation et que cela réduisait le risque de dépression post-partum.
Par ailleurs, en France, à 4 mois de grossesse, la future maman assiste à un Entretien Prénatal Précoce avec une sage-femme. Ce dernier vise à détecter sa vulnérabilité psychique, si elle existe. Si tel est le cas, elle sera orientée vers un professionnel de la santé mentale qui l’accompagnera tout au long de la période prénatale et parfois même après. Les visites chez le psychologue lui permettront de renforcer ses ressources mentales, de travailler sur ses anciennes blessures et de se préparer à sa nouvelle vie avec son bébé. Parallèlement à cela, elle suivra les cours de préparation à la naissance et à la parentalité pour développer et peaufiner ses compétences en tant que future mère.
Gestion du stress post-partum : conseils pour les jeunes mamans
Même s’il est normal que la chute d’hormones provoque chez elle une humeur triste, de la fatigue et des angoisses, il ne faut surtout pas banaliser les états émotionnels de la jeune maman. Il est même capital d’être à l’écoute de tous les symptômes, d’essayer de les réduire et de consulter si nécessaire.
Importance de l’hygiène de vie et du repos après la naissance
La période postnatale, après neuf mois de sollicitation hormonale, les changements corporels, le cumul de fatigue et le sommeil réduit, impose un défi considérable au bien-être physique et mental de la jeune maman.
Pour favoriser une récupération optimale, elle doit adopter un mode de vie sain. Cela englobe une alimentation de qualité qui comble ses besoins ainsi que ceux de son bébé en cas d’allaitement. Progressivement, elle devrait apprendre à déléguer pour libérer du temps pour faire du sport ou profiter de moments de détente et d’activités relaxantes. Enfin, bien que des nuits complètes ne soient pas toujours possibles, le repos durant la journée est essentiel pour maintenir la bonne humeur et une santé mentale équilibrée.
Le rôle du soutien familial et des groupes de soutien dans la gestion du stress post-partum
La présence physique auprès de la primipare, et même de la multipare, est nécessaire les jours suivant la naissance de l’enfant. En effet, tout un travail psychique se met en place à ce moment-là de la vie et comme la grossesse, il va chambouler la mère très fortement. Elle aura alors besoin de ne pas s’isoler, d’être rassurée et d’avoir de l’aide tant dans les tâches quotidiennes que dans la canalisation de ses ressentis et de ses émotions.
Si l’étayage familial ou amical fait défaut, ou même en sa présence, il est possible de rejoindre des groupes de soutiens ou de contacter des associations, des lignes d’assistances et d’autres institutions qui accompagnent les jeunes mères et les aident à surmonter le stress post-partum. Parmi ceux-ci, il y a :
- L’association Pâtes au beurre et sa ligne téléphonique Psy Santé Parents
- La Fédération nationale des Ecoles des parents et des éducateurs et sa ligne téléphonique Allo parents en crise
- L’hôpital mère-enfant de l’Est parisien
- Terra Psy
- Allo Parents Bébé…
L’importance de demander une aide professionnelle en cas de besoin
Après l’accouchement et l’émotion de la découverte de son enfant, les trois-quarts des mamans expérimentent le baby blues. Cet état ne doit pas dépasser les 10 jours.
Si les symptômes persistent et s’aggravent au-delà de ce délai, nous pouvons suspecter les prémisses d’une dépression post-partum. Celle-ci peut toucher 10 à 15 % des accouchantes. Elle se manifeste à travers une importante asthénie, de la tristesse et des pleurs incontrôlables, de l’irritabilité, un manque de confiance en soi, des difficultés à apprécier le rôle de mère… Nous pouvons aussi retrouver une phobie d’impulsion qui se traduit par la peur de faire mal au nouveau-né.
Ce trouble requiert une consultation chez le psychologue et c’est de la rapidité de la mise en place d’une prise en charge que dépendra le bien-être de la maman et de son bébé ainsi que la qualité de la relation qui les unira dans l’avenir.
Conclusion
La grossesse, période supposée heureuse, peut virer au stress persistant. Physiologiquement, les variations hormonales, le cortisol et la CRH engendrent alors divers troubles et risques, dont les fausses couches. Ils causent également des retards ou des anomalies dans le développement physique et cognitif du fœtus qui peuvent s’observer à l’accouchement ou bien plus tard. Gérer la tension psychique est donc essentiel et cela passe par des techniques de relaxation adaptées, une alimentation équilibrée, une activité sportive douce et un soutien social. Après la naissance, des mesures doivent être prises pour éviter le stress et les autres complications post-partum. Enfin, il faut noter qu’il est impératif de demander une aide professionnelle en cas de besoin.