Selon la Haute Autorité de Santé (2022), le psoriasis touche environ 4.42 % de la population en France. Relativement répandue, cette dermatose stigmatisante impacte lourdement la qualité de vie des personnes qui en souffrent. Ses poussées, enclenchées par le stress, vont elles-mêmes générer des angoisses et affecter le bien-être physique et mental du sujet. Aujourd’hui, nous allons explorer les mécanismes qui sous-tendent cette interaction et découvrir comment briser les chaînes de ce cycle pernicieux.
Qu’est-ce que le psoriasis et quel est son lien avec le stress ?
Au départ, le psoriasis était une maladie confondue avec la lèpre et la gale. Ce n’est qu’après le 19ème siècle, qu’elle fut clairement identifiée et reconnue comme une affection dermatologique auto-immune, épigénétique et chronique. Elle peut se développer à tout âge, mais ses premières poussées apparaissent communément entre 20 et 40 ans. Si le facteur héréditaire est la principale cause de son apparition, il s’agit de l’unique dermatose dont le lien avec le stress a été scientifiquement établi.
Comment se manifeste le psoriasis ?
Selon Augey et Nicolas (2008), le psoriasis est une maladie inflammatoire qui se manifeste, à travers des plaques rouges, squameuses, de tailles variables et parfaitement délimitées. Chez certains, cela peut avoir l’apparence de pustules, de gouttes, de cornes ou de simples rougeurs. Ces lésions peuvent toucher toutes les régions du corps, et notamment les muqueuses. Elles se retrouvent le plus fréquemment au niveau des coudes, des genoux, des jambes, du cuir-chevelu, du bas du dos, et même sur les ongles. Chez les bébés, elles se développent habituellement au niveau des fesses. Lorsqu’elles affectent les articulations, nous parlons de rhumatisme psoriasique. Des démangeaisons sont souvent rapportées par les patients, mais fort heureusement ces dernières ne laissent pas de cicatrices.
Sur le plan physiologique, cette dermatose épigénétique résulte d’un dysfonctionnement du renouvellement de l’épiderme et du système immunitaire. En effet, les symptômes sont sous-tendus par un dérèglement des défenses de l’organisme qui cause une hypersécrétion de kératinocytes. Celles-ci s’accumulent sur la surface de la peau, qui accuse un ralentissement de son processus de réparation, formant ainsi une hyperkératose et un épaississement de l’épiderme.
Les mécanismes biologiques impliqués dans le lien entre stress et psoriasis
La prédisposition génétique au psoriasis est incontestable. Il existe également des facteurs environnementaux, des pathologies infectieuses ou des médicaments qui peuvent favoriser l’apparition ou l’aggravation de la pathologie. Si le stress n’est pas reconnu comme la cause directe de cette maladie, il en est pourtant, très souvent, l’élément déclencheur ou amplifiant des symptômes. En effet, 31 à 88 % des cas recensés par la revue de la littérature de Rousset et ses collaborateurs (2018) attestent qu’un évènement stressant a précédé de peu la poussée de psoriasis.
Il faut savoir que face à une situation menaçante ou perçue comme telle, l’organisme procède à la sécrétion des catécholamines. L’adrénaline et la noradrénaline entraînent dégranulation mastocytaire qui va provoquer la libération de molécules pro-inflammatoires impactant l’efficience du système immunitaire. Parallèlement, l’axe hypothalamo-hypophysaire s’active. Le cortisol va être alors sécrété et il va altérer la fonction protectrice de la peau et sa perméabilité. Par ailleurs, l’état de tension mentale va perturber la synthèse de lipides épidermiques augmentant la prolifération des kératinocytes et initiant ou intensifiant la crise de psoriasis.
Enfin, il est essentiel de noter que les patients signalent une régression de l’anxiété lorsque les manifestations cutanées diminuent. Ainsi, la dermatose et les pressions psychiques s’auto-influencent.
Les traitements médicaux pour le psoriasis lié au stress
Comme cette affection dermatologique est chronique, le traitement passe par une phase d’attaque qui a pour but d’éliminer les plaques et une phase d’entretien qui va prévenir l’apparition de nouvelles lésions.
Conformément aux recommandations de la Société Française de Dermatologie, c’est une alternative non-biologique qui est indiquée en première ligne pour traiter le psoriasis sévère. Il s’agit en France du méthotrexate, de l’acitrétine ou de la ciclosporine. Ces derniers peuvent parfois être associés à la photothérapie. Pour les formes les plus légères, il est préconisé de prescrire des crèmes contenant des dermocorticoïdes ou des analogues de la vitamine D3.
Si ces remèdes ne s’avèrent pas efficaces, s’ils sont contre-indiqués ou si le patient présente une intolérance, il est possible pour le dermatologue d’opter pour un traitement de deuxième ligne. Parmi les options qui s’offrent à lui, d’après la HAS (2022), il y a :
- L’infliximab,
- Le certolizumab pegol,
- Le sécukinumab,
- L’ixekizumab,
- Le brodalumab,
- Le guselkumab,
- Le risankizumab,
- Le tildrakizumab.
En parallèle, un traitement psychotrope à base d’anti-dépresseurs ou d’anxiolytiques peut être envisagé si cela est jugé nécessaire par le praticien. Ces derniers ont prouvé leur efficience face à cette dermatose. Il est, cependant, capital d’éviter le lithium qui peut accentuer la sévérité des poussées.
Les approches complémentaires pour soulager le psoriasis causé par le stress
La prise en charge du psoriasis associé au stress, ne doit pas impliquer qu’une approche médicamenteuse. Des interventions complémentaires sont vivement recommandées afin de renforcer les ressources psychiques du patient et éviter ainsi de nouvelles poussées. Parmi les méthodes conseillées, il y a :
- La psychothérapie : si les angoisses et le stress sont tellement intenses qu’ils interfèrent grandement dans le quotidien et en arrivent à déclencher des épisodes de psoriasis, la thérapie cognitivo-comportementale peut être une solution pour améliorer la qualité de vie. Celle-ci permet de modifier les pensées automatiques dévalorisantes et de les remplacer par des idées et des cognitions plus rationnelles. Elle armera également le sujet pour qu’il gère mieux physiquement et mentalement les situations anxiogènes. A cette fin, elle utilise divers outils, dont la méditation pleine conscience.
- L’hypnose : l’Association France Psoriasis (2019) recommande l’hypnose et l’autohypnose aux sujets en souffrance. Ces techniques vont développer les pouvoirs d’auto-guérison du corps à travers les suggestions, tout en induisant un état de relâchement intense.
- La sophrologie : les séances aident à accepter la maladie, à écouter son corps afin de repérer les éléments déclencheurs des poussées et à améliorer la capacité à réprimer la compulsion de se gratter. Utilisant les méthodes de respiration, de relaxation et de visualisation, cette pratique réduit également significativement le stress.
- L’aromathérapie : les huiles essentielles de patchouli, de myrrhe, de romarin à verbénone ou encore de lavande fine ont prouvé leur efficacité sur la réduction de symptômes de psoriasis. Certaines d’entre elles ont également des vertus apaisantes. Il est possible de mélanger quelques gouttes de ces diverses essences avec un support, comme le gel d’aloe vera, avant d’appliquer sur les lésions deux fois par jour. Il faut noter qu’il est recommandé de faire un test sur une petite surface de peau saine 48 heures avant, pour éviter les réactions allergiques.
- L’acupuncture : bien que les résultats des recherches soient mitigés, dans certaines études, les lésions sont réduites de 50 % suite à des séances d’acupuncture. Nous recommandons donc cette approche, même si son action sur les plaques n’est pas encore clairement expliquée par la science.
Témoignage
Nous présentons aujourd’hui le témoignage de S., 37 ans, qui a réussi à retrouver l’apaisement physique et mental après un long parcours avec le stress et le psoriasis.
« À l’aube de mes 21 ans, les premières plaques ont fait leur apparition sur mon dos. Je suis certaine que cela a été une réaction à la perte de ma cousine, une personne très chère à mon cœur. Très rapidement, je me suis tournée vers un dermatologue qui a diagnostiqué le psoriasis et m’a prescrit des pommades pour soulager mes symptômes. Malgré des périodes de soulagement, au fil des mois, de nouvelles plaques ont émergé sur différentes autres parties de mon corps. Les démangeaisons, les saignements et les douleurs persistantes, accentués lors de moments stressants tels que la soutenance de mon mémoire de master par exemple, étaient difficiles à tolérer. Cette maladie a aussi généré des obstacles sociaux. Elle a influencé ma vie intime, mes escapades à la piscine et le choix de mes tenues estivales.
Après de longues années de traitements locaux, la découverte d’un excellent dermatologue m’a donné accès à une nouvelle génération de traitements, bien plus efficace. Cependant, il est indéniable que l’amélioration des plaques a également découlé de ma décision d’adopter une approche holistique pour retrouver le bien-être. J’ai embrassé un mode de vie plus sain, réduit mes soirées, adopté un régime alimentaire anti-stress et équilibré et intégré le yoga à ma routine. Une thérapie brève avec un psychologue m’a aussi beaucoup soulagée. L’élimination des toxines et la gestion émotionnelle ont été les piliers de mon parcours. Soutenue par un entourage bienveillant, je suis aujourd’hui en rémission et désireuse de partager l’espoir avec ceux qui souffrent. Des solutions existent et explorer des voies alternatives permet une compréhension plus profonde de soi-même. »
Recommandations pour prévenir et gérer le stress lié au psoriasis
Afin de limiter l’impact de cette pathologie non-contagieuse mais fortement désagréable, il est crucial d’apprendre à maîtriser son stress au quotidien. Pour cela, il faut :
- Une alimentation anti-stress : manger de manière équilibrée tout en privilégiant les aliments riches en tryptophanes, magnésium, oméga-3 et vitamines va réduire la réactivité au stress. Par ailleurs, Nazıroğlu et ses collaborateurs ont prouvé en 2012 qu’une supplémentation en sélénium bloque la libération de cytokines pro-inflammatoires et améliore les symptômes du psoriasis.
- Un sommeil réparateur : il faut savoir que cette dermatose affecte la qualité du sommeil et que ceci va avoir pour conséquence une persistance de la symptomatologie et une moins bonne gestion du stress. Pour éviter cela, il est conseillé de méditer ou de faire de la respiration diaphragmatique avant l’endormissement et de maintenir la température de la chambre en dessous de 18 degrés. Un humidificateur d’air permet également de diminuer les démangeaisons et l’envie de se gratter.
- Éviter de fumer et de consommer trop d’alcool : il a été démontré que ces substances aggravent la maladie. En plus, les boissons alcoolisées peuvent interférer avec les composants des traitements médicamenteux et diminuer leur efficacité.
- La pratique sportive : l’exercice physique est bien sûr recommandé afin de renouer avec la sérénité. En effet, il va permettre de libérer régulièrement des doses importantes d’endorphines et de dopamine qui vont contrer les effets du cortisol. Cependant, il faut choisir des disciplines où peu de frottement sera exercé sur les zones qui présentent des lésions.
- Le yoga : s’ils n’ont pas de pouvoir magique pour guérir, les exercices et les postures vont quand même instaurer une harmonie interne et calmer l’organisme en améliorant la respiration et la circulation sanguine.
Conclusion
Le psoriasis est une dermatose invalidante fortement liée au stress, caractérisée par l’apparition épisodique de plaques squameuses qui démangent. La sécrétion de catécholamines et de cortisol, induite par la pression psychique, impacte le système immunitaire, altère la barrière cutanée et favorise l’apparition ou l’aggravation des poussées de cette maladie inflammatoire. La prise en charge de cette affection est holistique, combinant traitements médicaux et approches complémentaires, telles que la psychothérapie, l’hypnose, la sophrologie, l’acupuncture et l’aromathérapie. L’hygiène de vie, le sport et le yoga peuvent également contribuer à améliorer le bien-être physique et mental.